Chailly à Lucerne

La question de la succession de Claudio Abbado à Lucerne après sa disparition en janvier 2014 occupait tous les esprits. Le nom le plus souvent évoqué était celui d’Andris Nelsons d’ailleurs invité en ce lieu pour diriger un concert hommage au maestro italien à Pâques 2014. Mais entre temps, il fallait pourvoir le poste de Berlin, ce qui fut finalement fait non sans difficultés en mai dernier et Andris Nelsons a récemment annoncé la prolongation de son mandat à l’Orchestre symphonique de Boston jusqu’en 2022.

C’est donc dans une chronologie logique mais aussi avec une certaine surprise que l’on appris début août la nomination de Riccardo Chailly pour cinq ans. Ce dernier prendra ses fonctions de directeur musical du prestigieux orchestre du Festival de Lucerne en 2016 et ouvrira le festival les 12 et 13 août 2016 avec la “Huitième Symphonie” de Gustav Mahler. À l’avenir, Riccardo Chailly dirigera quatre à cinq concerts pendant le festival d’été, mais son rôle durant le festival de Pâques, moins prestigieux et moins long, n’a pas été précisé.

Né à Milan il y a 63 ans, Riccardo Chailly a quitté en juin 2016 la direction du Gewandhaus de Leipzig qu’il occupait depuis 2005 et est directeur musical de  la Scala de Milan depuis janvier dernier. Il se voit donc offrir un troisième poste prestigieux et extrêmement convoité. Son immense talent, son répertoire presque infini et sa grande expérience des milieux germaniques feront certainement merveille. Espérons surtout que sa santé, que l’on dit fragile, lui permettra de mener de front ces différentes activités au plus haut niveau qui a toujours été le sien.

Après Toscannini avant la guerre et Abbado de 2003 à 2014, Riccardo Chailly sera donc le troisième chef italien en poste à Lucerne. Commencer son mandat par la “Huitième symphonie” de Mahler dont il est un magistral interprète (il a déjà donné un magnifique enregistrement à Amsterdam et il existe un superbe DVD fait à Leipzig) est un émouvant et intelligent clin d’œil à son ami et maître Claudio Abbado qui l’avait engagé comme assistant à la Scala lorsqu’il avait 18 ans. Ce choix d’une symphonie chorale (on se souvient qu’Abbado avait débuté à Lucerne avec la symphonie N°2 dite “Résurrection” de Mahler), et de la seule qu’il n’avait pas dirigée à Lucerne, n’est certainement pas un hasard. Riccardo Chailly poussera même un peu plus loin la symbolique du passage de témoin et de la fidélité à son prédécesseur en invitant pour cette huitième symphonie Orfeón Donostiarra, l’excellent chœur amateur basque tant aimé par Abbado et déjà sur scène à Lucerne en 2003. La boucle est donc belle et bien bouclée maestro…Bienvenue à Lucerne Riccardo et rendez-vous en août 2016 !