Festival de radio France à Montpellier 2014

En direct de la Capitale de la Région Languedoc-Roussillon avec l’envoyée spéciale des Amis d’Arthur, Anne Andreev.

 Le soleil Montpelliérain plombe la parisienne ravie de constater qu’une valeur sûre persiste dans la mouvance sociétale actuelle.

Jeudi 17 à 12h30 Lucile Boulanger viole de gambe Arnaud De Pasquale clavecin

Les deux instruments semblent bien fragiles sur l’estrade de cette salle de 745 places, les talons du public sonnent sur l’escalier de bois, l’accordeur, la tête dans le clavecin martèle une note à peine audible.

Je dois remercier les organisateurs de ce festival qui nous offrent ces concerts extraordinaires gratuits pour un public peut être plus composite que pour les concerts « classiques ». Les codes d’applaudissements sont souvent audacieux, entre les mouvements d’un morceau ou suite à un phrasé un peu emphatique en cours de mouvement …

La qualité de jeu des musiciens, leur exigence de justesse avec force pauses pour accorder, qui le clavecin, qui la viole de gambe entraine progressivement le public qui doit tendre l’oreille pour entendre le clavecin (concert non sonorisé) vers une concentration digne des plus grands concerts. Lucile nous envoie de généreuses volutes qui viennent nous envelopper de circonvolutions mélodiques avec une moue lascive et sa chevelure noire ondulée sur le côté, tête penchée évoquant tout à la fois Klimt et Fernand Léger.

Les auditeurs de France-Musique ont perçu un parfait équilibre entre ces deux instruments, chacun étant capté par un micro puis diffusé à la puissance nécessaire pour un bon dialogue musical.

Jeudi 17 « la spatialisation du son à Radio France »

Cette problématique de l’adéquation entre les musiciens (l’émetteur) et l’auditeur (le récepteur) est au cœur des recherches que mènent les ingénieurs de Radio-France.

Depuis le premier enregistrement en 1860 (1D mono), nous arrivons au son « 3D ». Nous expérimentons cette écoute diffusée par un alignement de hauts parleurs rapprochés dessinant un carré autour du public. Dimension de ce carré ajustable à la salle. Cette synthèse de front d’onde (système WFS) est issue du principe de Huygens décrit en 1690. Plus de développement sur cette question sur le site www.nouvoson.fr

Il en résulte une immersion de l’auditeur, un peu comme lorsque nous chantions avec orchestre, par exemple le Requiem de Berlioz dans la formation instrumentale complète … ou lors des répétitions avec notre toujours regretté Arthur Oldham. Ce dispositif est une nouvelle lutherie électronique dont peuvent jouer les compositeurs.

Le concert du soir « musique spatiale » nous emmène dans ces sonorités issues à la fois des instruments sur scène et de leurs développement, distorsion, échos, redéfinition de l’enveloppe … à l’aide de calculs d’ordinateurs. Ces sonorités vont circuler autour de nous selon les hauts parleurs choisis pour leur diffusion à tout moment. La musique vient à nous, et plus que cela. Le chant de Kaija Saariaho lors de la pièce « Lonh pour voix de femme et électronique » donne à entendre, par le jeu de la lutherie électronique, les univers qui l’entourent et/ou l’habitent, remplaçant les décors et l’orchestration classique, chacun s’appropriant les évocations sonores. Un beau voyage avec la légèreté et la rapidité de changement d’ambiances, d’émotions libérés de la matière.

Sonorisation des salles, concerts diffusés à l’antenne, boite de diffusion électronique adaptable à tout lieu … Autant de problématiques qui s’entrecroisent cette journée à Montpellier. Autant de réponses par la démultiplication des « supports » de diffusion et surtout les vastes champs de styles et formes de musiques vocales, instrumentales, mixtes …

Nous avons la chance que toutes les pratiques soient concomitantes à notre époque.

Besoin de trouver un lieu dont le volume, les proportions, les matériaux constituent directement la caisse de résonnance de la musique qui va s’offrir à mes oreilles et mes sens. Une amie Montpelliéraine m’emmène à l’hôtel Magnol.

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Restauration sobre dans le respect des matériaux, le luthier hôte de ce lieu vient situer l‘histoire de J.B. Guadagnini dans le contexte des années 1770 ou a été fabriqué le violon sur lequel jouera Akiko Ono, accompagnée au piano par la très modeste professeur du conservatoire de Montpellier Dominique Taouss. Musique grouillante de vitalité, la sonate de Mozart in F K376 donne à voir l’enfant de Amadeus, les “Slavonic Dance” in e minor de Dvorak/arr. Kreisler convoquent toute l’Europe de l’Est (le grand Yehudi Menuhin n’est pas loin) … Harmonie du lieu, de la musique, des musiciennes, du public, un verre partagé dans la petite cour ombragée vient refermer cette belle rencontre pour le plaisir des sens.